Réserve Naturelle Nationale Ballons Comtois

Enjeux et gestion

Pour répondre à l’enjeu prioritaire de conservation du patrimoine naturel, chaque Réserve Naturelle définit des objectifs de gestion qui lui sont propres. Ces objectifs sont ensuite déclinés de manière opérationnelle en actions.

A cet effet, le gestionnaire élabore, en concertation avec les acteurs du territoire, un document de référence : le plan de gestion. D’une validité de 10 ans, ce document définit les actions à mettre en place pour répondre aux objectifs à moyen et à long terme.

 

La gestion de la Réserve Naturelle des Ballons Comtois

Les orientations de gestion se déclinent selon 7 grands axes :

  • Assurer un état de conservation optimal pour les habitats et les espèces à forte valeur patrimoniale
  • Favoriser le caractère naturel et une diversité optimale sur l’ensemble du massif forestier
  • Augmenter la viabilité de la sous-population de Grand Tétras
  • Maîtriser les fréquentations
  • Connaître le patrimoine naturel de la Réserve et favoriser la recherche fondamentale
  • Faire découvrir et comprendre les enjeux de la Réserve
  • Préserver les autres patrimoines

En pratique

Les forêts de la Réserve sont traitées en futaie irrégulière. La futaie irrégulière consiste à assurer un renouvellement diffus sur l’intégralité de la forêt, en maintenant des arbres d’âges différents : des jeunes, des vieux et des arbres en maturation.  Avec les revenus de l’exploitation forestière et de la chasse, la forêt constitue une ressource non négligeable pour les différents propriétaires que sont l’Etat, les communes et les propriétaires privés.

En forêt Domaniale (plus de 1700 ha appartenant à l’Etat), il est prévu un respect strict de la directive de gestion des forêts à tétraonidés. Outre la préconisation de certaines règles visant à conserver ou à améliorer les biotopes à grand tétras, cette directive prévoit l’interdiction de toute intervention sylvicole durant la période sensible du 15 décembre au 15 juillet. De plus, près de 245 ha de forêts ont été classés en Réserve forestière intégrale. Les seules interventions qui y sont envisageables sont liées à l’aspect sanitaire et à la sécurisation des itinéraires balisés.

Les 4 chaumes de la Réserve sont pâturées par différents troupeaux d’agriculteurs locaux. Pour en assurer leur bon état de conservation, un document de gestion conservatoire est établi. A partir d’un suivi de la faune et de la flore, il définit la gestion à mettre en place : pâturage (nature et taille du troupeau, saison de pâturage, non utilisation de produit phytosanitaire et d’amendements…), débroussaillage ponctuel, non intervention… L’objectif est de trouver un équilibre pour maintenir un haut niveau de biodiversité, notamment floristique, et tout en limitant la fermeture du milieu par la forêt.

En ce qui concerne les tourbières, le mode de gestion retenu est globalement la non intervention. Deux d’entre elles, Bravouse et Rossely, sont même rendues inaccessibles au public par arrêté préfectoral.

 

Amélioration des connaissances

Afin d’appliquer une gestion adaptée aux objectifs de conservation visés, il est nécessaire de bien connaître les différentes composantes du site : les milieux naturels, les espèces et les interactions qui existent entre.

Les agents de la Réserve Naturelle mènent donc régulièrement différents suivis scientifiques et études visant à approfondir les connaissances sur ce site.

Plusieurs travaux d’inventaires et de suivis sont en cours ou en projet :

  •  le suivi des insectes à fort enjeux patrimoniaux (papillons, libellules, criquets…)
  •  les prospections et suivis sur les oiseaux (chouettes, tétraonidés, oiseaux prairiaux)
  •  le suivi de la flore à travers différents dispositifs, notamment des espèces à très fort enjeux : Polystic, lycopodes et orchidées…
  • l’amélioration de la connaissance par des inventaires sur de multiples groupes : champignons, lichens, mousses, chiroptères…
  • Le suivi des forêts, à travers l’application d’un protocole national : le PSDRF,
  • Le suivi des prairies par un inventaire régulier sur 40 placettes permanentes

La Réserve est par ailleurs associée à divers programmes d’expertise, de recherche, d’inventaires et de suivis nationaux.

Quelques exemples d’actions

Dans les milieux ouverts

Les gestionnaires s’attachent à maintenir les milieux prairiaux ouvert, voire à restaurer d’anciennes zones ouvertes en utilisant des techniques de coupe et de débardage alternatifs : 

  • En 2005, l’ensemble des épicéas d’une parcelle de la forêt domaniale de Saint Antoine sont coupés et exportés afin de réhabilité la prairie du Plain des Bœufs. 
  • Entre 2013 et 2015, une coupe de plus de 1300 épicéas sur le Ballon de Servance pour retourner à un milieu de pré bois pâturé dans le secteur ouest de la chaume. Le débardage s’est réalisé par câble mât et les bois ont été broyés. D’autres travaux sont en cours ou à venir sur ce secteur, toujours avec des techniques peu impactantes pour le milieu naturel.
  • En 2016 et 2017, la restauration du pré bois sur la chaume du Beurey sur un hectare. Les bois ont été débardé par traction animal. 

Un travail d’expérimentation pour la lutte contre la fougère aigle sur la chaume du Querty est menée depuis 2014. Cette espèce, pouvant être considérée comme envahissante, étouffe la végétation typique des prairies vosgienne. Un rouleau brise fougère est passé 2 fois par an au printemps et en fin d’été pour casser la fougère et ainsi favoriser l’apparition de maladie au niveau de la tige et la faire régresser. Ce traitement est appliqué sur une surface d’un hectare et les résultats sont prometteurs : la surface colonisée à diminuée de 10% mais surtout les pieds de fougères sont moins denses et la végétation herbacée peu enfin de nouveau s’exprimer (pensée des Vosges, arnica, myrtille…)

Dans la forêt

Une place importante est laissée aux arbres à forte valeurs écologiques. Il peut s’agir d’arbres à cavité, porteurs de mousses, lichen ou champignons, souvent de gros diamètre (supérieur à 70cm) ou encore mort sur pied ou au sol. Ces arbres, présentant bien souvent un intérêt économique limité dans le contexte de la Réserve Naturelle, sont maintenus à hauteur de 3 à 8 arbres par hectare : ils grandiront, vieilliront et finiront par mourir naturellement.

Les gestionnaires négocient ces chiffres, à l’échelle d’une parcelle ou d’une forêt, avec chaque propriétaire, à l’occasion des révisions de document d’aménagement forestiers, des préparations de martelage et des martelages (action de marquer les bois à couper) : Ils sont marqués d’un « triangle pointe en bas », afin d’indiquer aux exploitants l’interdiction de les couper.

Par ailleurs là où a lieu l’exploitation forestière, la consigne est de ne travailler que entre le 15 juillet et le 14 décembre. En dehors de cette période, aucune coupe d’arbre n’a lieu en forêt dans le but de préserver la quiétude de la faune.

En complément à ces bonnes pratiques, des îlots de sénescence peuvent être proposés aux propriétaires privés : il s’agit de zone sans exploitation forestière, pour une durée minimum de 30 ans. Enfin, une zone sans exploitation forestière de 245 ha assure un stock conséquent d’arbres à fortes valeurs écologiques.

Dans les milieux tourbeux

Les tourbières sont des milieux particulièrement fragiles et sensibles. Ces cœurs de biodiversité bénéficient d’une attention particulière et font l’objet d’études scientifiques : fonctionnement hydraulique, suivi de la faune et de la flore et des habitats. Les résultats de ces suivis sont interprétés et permette de justifier de la gestion (ou non gestion) mise en place.

Sur le site du Grand Rossely et la tourbière de Rond trou, en 2011 et 2015, les enjeux relatifs aux papillons (nacré de la canneberge, damier de la succise) et aux libellules ont plaidé en la faveur d’une coupe manuelle d’épicéas et du cerclage d’autres arbres afin de maintenir un espace suffisamment ouvert.